Les emprunts d'Etat ont profité lundi des nouveaux développements de la crise financière en Europe, les investisseurs se tournant particulièrement vers la dette à maturité courte, plutôt que vers les obligations à long terme.
Signe de la désaffection envers les actifs risqués, le rendement du bon du Trésor américain à 3 mois reculait encore, à 0,66% contre 0,84% vendredi. Il creusait ainsi l'écart avec le Libor (taux interbancaire offert à Londres) à 3 mois, monté à 3,8825% contre 3,7618% vendredi.
"C'est l'expression d'une défiance entre les banques européennes", après la nationalisation partielle de Fortis, le démantèlement de Bradford & Bingley, et les rumeurs entourant Dexia, a expliqué à l'AFP Marie-Ange Fouques, gérante obligataire chez Barclays.
Ce mouvement de refuge profitait aussi au Schatz allemand à 2 ans, dont le taux se détendait à 3,408% contre 3,659% vendredi, et plus modestement au Bund allemand à 10 ans, dont le taux revenait à 3,968% contre 4,165% vendredi soir. Le rendement de l'OAT française descendait à 4,275% contre 4,419% vendredi.
"Quand vous avez très peur, vous préférez avoir du très court terme mal rémunéré, plutôt que du long terme avec une petite incertitude sur l'évolution des dettes d'Etat", a commenté Guillaume Sciard, également gérant chez Barclays.
En effet, selon Marie-Ange Fouques, le marché obligataire est depuis plusieurs semaines le théâtre d'une "partie de bras de fer" entre deux analyses de la situation: la panique suscitée par les défaillances de banques, d'une part, et les craintes sur le creusement des déficits, d'autre part.
Nourrissant l'appétit pour les placements réputés sûrs, le marché "se focalise un peu plus sur les difficultés des banques européennes, maintenant que les restructurations prennent tournure aux Etats-Unis", souligne M. Sciard.
Par ailleurs, nombre d'intervenants espèrent que la Banque centrale européenne se résignera à baisser ses taux dans les prochains mois, contrainte par la crise financière et la dégradation de la conjoncture en zone euro, ce qui profite également aux emprunts d'Etat.
Mais la ruée vers l'obligataire risque de se heurter rapidement, selon Mme Fouques, aux conséquences budgétaires des efforts consentis pour renflouer le système financier. "On ne pourra pas oublier longtemps la solvabilité des Etats", estime la gérante de Barclays.
"Les dettes vont clairement exploser en Europe", au risque de rendre les prochaines émissions obligataires malaisées pour les gouvernements, renchérit Guillaume Sciard.
Sur le marché britannique, le taux du Gilt à 10 ans s'est détendu à 4,376%, contre 4,533% vendredi.
Aux Etats-Unis, le rendement du bon du Trésor à 10 ans revenait à 3,648% contre 3,827% vendredi soir, et celui à 30 ans à 4,185% contre 4,357% vendredi.
AFP