par Lara Jakes Jordan, AP
Le FBI pourrait prochainement être autorisé à ouvrir des enquêtes sur des personnes considérées comme potentiellement suspectes en raison de leur appartenance raciale ou ethnique. Ces nouvelles directives, envisagées par le ministère de la Justice pour renforcer la lutte antiterroriste, suscitent l’inquiétude des défenseurs des libertés publiques.
Actuellement, les agents du FBI ne peuvent ouvrir une enquête sur des ressortissants américains ou résidents titulaires de papiers en règle sans raisons précises, notamment la preuve qu’une loi a été ou va probablement être enfreinte. Les nouvelles directives permettraient à la police fédérale d’ouvrir une enquête préliminaire après avoir établi le profil de personnes considérées à risque.
L’appartenance ethnique et/ou religieuse, le déplacement dans des régions du monde connues pour leur activité terroriste, l’accès à des armes ou entraînements militaires figureraient parmi les critères susceptibles d’entraîner une suspicion, ont expliqué à l’Associated Press de hauts responsables du FBI, du ministère de la Justice et des services de renseignement. Les agents fédéraux pourront par exemple enquêter sur les activités de musulmans ou d’Américains d’origine arabe si leur profession et profil personnel les rendent suspects, même en l’absence de délit avéré.
Ces changements, prévus avant la fin de l’année, s’inscrivent dans le cadre de nouvelles directives du ministère de la Justice, sur fond de réorientation des missions du FBI : la priorité de la sûreté fédérale est désormais la lutte antiterroriste, et non plus seulement la répression de la criminalité traditionnelle.
Il s’agit de localiser les terroristes avant qu’ils puissent passer à l’acte, comme l’a demandé le Congrès après les attentats du 11 septembre 2001, plaide un haut responsable du FBI. Les nouveaux règlements, s’ils sont adoptés, seront mis en place dans les derniers mois d’une administration critiquée à de nombreuses reprises par les défenseurs des libertés publiques.
Le FBI pourra ouvrir des enquêtes simplement "en supposant que chacun est un suspect", faisant fi de la présomption d’innocence, déplore Caroline Fredrickson de l’Union américaine pour les libertés civiles (ACLU).
Le ministre de la Justice Michael Mukasey a reconnu que la politique actuelle du FBI était en cours de révision. Il faudra s’assurer que les nouveaux textes n’entrent pas en conflit avec ceux régissant actuellement les enquêtes criminelles, a-t-il ajouté sans fournir de plus amples précisions.
Les agents du FBI, note un haut responsable du département de la Justice, sont autorisés depuis 2003 à établir des profils "d’évaluation de la menace" à partir d’informations figurant dans les fichiers publics (permis de conduire, etc.) ou transmises par des informateurs. Ces évaluations pourraient être utilisées pour l’ouverture d’enquêtes préliminaires, ajoute-t-il. Un autre responsable remarque que le dispositif autorisé en 2003, sous contrôle étroit du siège du FBI, a semé une certaine confusion : les agents fédéraux ne savent pas comment et quand l’utiliser.
Les nouvelles directives ne donneront pas au FBI plus de pouvoirs qu’auparavant, assure Brian Roehrkasse, porte-parole du ministère de la Justice. Les agents fédéraux, ainsi, ne pourront pas mettre en place des écoutes téléphoniques, éplucher les courriels et relevés bancaires d’un suspect dans le cadre d’une simple enquête préliminaire. "Toute révisions, tout changement reflétera nos préoccupations traditionnelles pour les libertés civiles", a insisté M. Roehrkasse.
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